4.20.2010

L'Impuissant

Rien qu'en lisant le titre, on peut vous sentir en crispation intense. Si.
Ceux qui sont impuissants se crispent, et on les comprend. Les pauvres.
Ceux qui ont connu l'Impuissant se crispent, et on les comprend. Les malheureuses.

Ceux qui ont peur de l'être, ou qui redoutent de rencontrer l'Impuissant se crispent aussi, et on les comprend tout autant. C'est flippant, un Impuissant.

Mais aussi c'est ça qui est fort chez l'Impuissant, car même si c'est fondamentalement un incapable, hein, on peut quand même lui accorder un certain talent malgré tout : celui de générer un sentiment de crainte et de déception plus solidaire et collectif que les régionales, par exemple. Disons que l'Impuissant pourrait mettre d'accord tous les Français, s'il le voulait. 
Du talent dans sa faiblesse. L'impuissant, un mythe vivant. Inquiétant. Jamais trop loin, qui nous guette un peu au détour de n'importe quelle paire de draps Ikéa, prêt à l'attaque la débâcle.
Un emblême national, quoi.

Pour l'Impuissant, il y a des phrases cultes et un discours pré-établi conçu spécialement pour lui : des "t'inquiète, je m'en fiche, je suis bien dans tes bras" déclamés par la pauvre fille déçue, cependant trop beaux pour être vrais ; des "c'est la première fois que ça m'arrive", tellement entendus que ça va deux secondes, si cette panne c'est la première, cette passe aussi c'est la première alors. On s'en donne à coeur-joie, mytho pour mytho, mollesse pour mollesse. Autant quitter vite le lit, triste théâtre d'une action regrettablement avortée. On a presque envie de pleurer, même.


Pour l'Impuissant, et notons qu'il se cache très bien hein, qu'il parfois a de l'argent, un bel appartement, et même des amis sympas, pour l'Impuissant il y a, rappelons-le sans vergogne, des problèmes moteurs et des problèmes sexuels. Ainsi l'Impuissant, aussi improductif soit-il pour notre organisme, devient malgré tout une machine super productive : pour lui, médecins spécialisés, sexologues, Viagra, godes. Au petit bonheur la chance. Il génère tout un business, et ce sans rien faire, justement. Un génie un peu, le petit. 
Le roi du paradoxe : je fais rien mais je génère.
Or l'Impuissant n'en est pas à un paradoxe prêt : pour lui, et c'est bien là le comble, il y a que la bite qui compte. L'Impuissant regardera tout penaud son engin, et vous oubliera en deux secondes, perdu dans un monologue intérieur avec son zizi riquiqui et mollasson. Dialogue de sourd.

-Lève-toi.
-Non.
-Putain lève-toi.
-Non.
-Allez, steuplé, lève-toi.
-Non.
-Rien qu'une fois.
-Va te faire foutre, impuissant.

Mais des questions s'imposent. Avec tous ces Impuissants agaçants, ces Impuissants qui servent à rien d'autre que causer des soucis, ces Impuissants déprimants : existe-t-il des impuissants puissants ? Des irréductibles gaulois décidés à conquérir la Gaule malgré la fragilité de leur menhir ? Coûte que coûte ? Sans craindre l'incrédulité des Romains ?
Certes, il y a l'Impuissant qui se sait impuissant, et pour lui, c'est cuit à mort. Franchement, il est im-puis-sant. Le terme en lui-même le condamne à vie. Impuissant, impuissant, ça résonne dans sa tête, dans sa vie, dans son lit. (Pas dans notre cul, malheureusement.)
Puis il y a l'Impuissant "comme un puissant". Qui ne dialogue pas avec sa bite. Qui vous fait oublier sa bite. Qui fait comme si de rien n'était, tellement qu'on finit par croire que rien de chelou n'est en train de se passer. Ou de pas se passer, plutôt. Il fait mine de vraiment pas comprendre quand, embêtée, on murmure : "c'est pas grave, t' sais (j'ai l'habitude, c'est la première fois, hein )". 
C'est celui qui pense que ce n'est véritablement pas grave. L'Impuissant dans le déni, quoi.


Il a sans doute raison, et il le prouve. On jouit même. Pas comme d'habitude, mais on sent qu'il y a quelque chose de quasi mystique à jouir sans bambou justement.


Mais en fin de compte, orgasme à la clef ou pas, nuit de folie ou pas, il ne reste qu'une seule Vérité, universelle et transcendantale, à laquelle nous sommes obligées de toutes et tous nous soumettre tant elle reste toujours valable :

Quoiqu'il fasse, quoiqu'il dise, l'Impuissant est un Impuissant.

Et cette impasse conceptuelle et corporelle résonnera toujours. Partout. Sauf dans notre cul. Et c'est bien çà le problème.




4.01.2010

Le Corse à Paris

Si l'on parle d'un Corse en Corse, on n'est certes pas à court de clichés, et de romanesque : et que je te chope dans le maquis, et que je te chasse un marcassin, et que je t'emmène en mule dans la montagne. (Le Corse de Corse est un berger, fondamentalement.)
Le Corse à Paris, c'est définitivement autre chose. Et ceux qui sont Corses à Paris ne me contrediront pas. Ne nous éternisons pas sur le nombre flippant de fonctionnaires, pour ne pas dire poulets, qui sont des Corses à Paris. Si sur l'île ils sont profs, sur le continent ils se dégénèrent. Flics Corses... La meilleure solution pour éviter ces pourris de flics Corses à Paris, c'est d'avoir un bel autocollant du Maure sur la vitre arrière, ou le casque de scooter. Véridique. On fait pas chier un cousin.
Parlons maintenant des autres Corses à Paris.
Comme on dit chez nous : "Les meilleurs Corses, ce sont ceux qui ont quitté l'Ile." 
Ils ne sont heureusement pas tous flics. Comment rapidement les reconnaitre ? Les Corses parisiens, sachez-le, se donnent à être reconnus. Ils ne vont pas attendre que vous daignez vous intéresser à eux pour vous le dire. Ils y vont franco, un peu comme les Bretons. Je suis Corse. Comprenez  : je suis pas un pigeon, ni un poulet (cette fois), alors fais bien gaffe à ta petite gueule. Essayez donc d'être en de bons termes avec le Corse à Paris, ça vous évitera : 1°) D'avoir des flics Corses au cul, ou toute une famille en rage 2°) De vous faire planter pour une petite plaisanterie de trop 3°) D'être persona non gratta à l'aéroport d'Ajaccio. Comme les juifs, ou les Chinois, c'est une vraie communauté. Invisible, omniprésente. Et les Corses à Paris sont les pires des Corses : jalousés sur l'île de beauté par les pecnos qui sont restés, considérés comme des traîtres, ils se serrent bien les coudes à la Capitale. Normal. On a moins honte à plusieurs.

Le Corse à Paris est brun. Faut pas déconner avec les métissages, vus n'en verrez pas UN blond. Corse, corsé, brun, c'est dans l'âme. Même le sang est plus foncé, et il tourne plus vite, à ce qu'il paraît. 
Le Corse à Paris ne parle pas le Corse, ou très mal. Mais il connaît des mots corses,  bien sûr : coppa, castagnu, brocciu, lonzo, ... Des noms de bouffe. Car c'est ce qu'il a gardé précisément de son pays (qui n'est pas la France, mais La Corse) : le goût des bonnes choses, et une maison de vacances. Le Corse à Paris est donc le comble du chic. Ne soyez pas snob avec lui, avec un peu de chance, il vous invitera dans sa maisons dans les terres, se baigner dans des rivières où les touristes se font canarder, tranquillité du pays et haine des touristes oblige.

Le Corse à Paris est charmant. Eh oui, il est brun, aime la bonne bouffe et a une maison en Corse. Que demande le peuple ? Mais attention : le Corse, à Paris ou ailleurs, reste un Corse. Toujours.
S'enticher d'un gars teigneux comme lui est risqué. Avant même d'avoir eu le temps de dire Cazzu*!, vous voilà habillée toute de noir, l'air austère, avec un couvre-feu de 22h pétantes.

Et faites attention quant à le faire curnutu** : soit il vous fait la peau, soit il ne vous parle plus.
Jamais.
Plus jamais.
Plus jamais jamais.

Car le Corse, est, avant toute chose, rancunier.
Vindetta !


*pénis
**cocu