11.11.2012

Le Soupirant

Ô doux soupirs des amoureux de l’été indien, qui se baladent main dans la main dans un Paris lumineux de fin septembre… Attendez un peu que la pluie de l’automne vienne moisir vos amours et retenez votre souffle : la saison sera rude.  Au tout départ, pourtant, on semblait bien paré pour l’hiver : on avait trouvé notre Soupirant pour amortir la rentrée entre deux nuitées. Oui, après quelques jolis textos se trouvait enfin dans notre répertoire de Smartphone un garçon pas trop con justement, et assez charmant pour nous susurrer des mots doux à faire beugler les Patricia Kaas qui se meurent en nous. Faisan fi du froid, voici notre Soupirant qui se pointe, brillant, in et dans le vent, les bras chauds et ouverts pour hiberner en paix. Amoureux saisonnier ou sigisbée des Temps Modernes en cette capitale désincarnée, avec le Soupirant pas besoin de nouveau manteau automne-hiver 2012, on a foncé direct sous la couette pour répondre à ses rauques soupirs en coeur. Soupirant ardu du soir au matin, des soirées branchées arrosées au brunch sur le Canal Saint-Martin, sa parade amoureuse nous a donc entraîné loin de nos souvenirs d’été. Entre délices et pavoisons, on s’est prises au jeu du Soupirant, haletantes d’amour yeux dans ses yeux, heureuses enfin de connaître cet homme-là. Main dans la main, on s’était même cru dans une chanson de Fauve qui finirait bien.

Hélas, après d’innombrables bouffées d’amour frais et de chuchotements de galant, le voici soupirant au moindre mot et à la moindre injonction. Perdu dans les tréfonds de la carte du Tendre, sans détours le tourtereau malotru en a fini des mots bleus, l’amour a gercé et, sans voix et sans crier gare, il soupire. Yeux au ciel. Il soupire. Encore et encore. Pfiou. Le Soupirant désormais nous balance un silence d’or ou de boue qui sonne pire qu’une remontrance. Inspiration, yeux vides, expiration, le Soupirant ne craint apparemment pas la comparaison à un enfant de huit ans, et conjugue entre deux zéphyrs buccaux tous nos mots à la fatigue, piétinants nos illusions entre deux respirations. D’ivre d’amour à tout bêtement saoulé, chez le Soupirant le pas n’est pas grand. Notons que de Soupirant qui soupire à pouffe qui pouffe, il l’est moins encore. Et qu’à force de soupirs le Soupirant s’essouffle et frise… l’expiration. A bout de souffles ?

- C’est vraiment dégueulasse…
- Qu’est-ce qu’il a dit ?
- Il a dit que vous êtes vraiment une dégueulasse. 

- Qu’est-ce que c’est, « dégueulasse » ?   

2.27.2012

Celui qui porte un bonnet

Hormis le rude hiver qui admet bien quelque fantaisie niveau look pour un homme, et qu’ainsi l’on puisse croiser des hordes de pomponnés non pas à Val D’Isère, mais sur les grands boulevards parisiens, y’a rien de plus dégueulasse que d’aller en soirée, ou au cinéma, ou dans un bar, et de voir un mec qui a un bonnet à toute occasion, comme ceux qui apportent des capotes avant d’aller passer des vacances en famille. On sait jamais, y’en a qui espèrent toujours baiser, celui qui porte un bonnet espère toujours qu’il neige, faut croire.

Bonnets tricotés par une charmante grand-mère en vente chez Colette, pompons boursouflés sans gêne, de laine ou de coton, et de toutes les couleurs, plutôt que de tomber le caleçon, Celui qui porte un bonnet s'est mis à porter la calotte hivernale en tous temps et à toute saison, et, pire du pire, à l’intérieur. Qu’on le dise haut et fort : porter un couvre-chef en intérieur est parfaitement impoli et goujat, alors que faire de cet énergumène qui nous inspire des réflexes de proviseur s’attachant à ôter les casquettes des têtes ?
Déjà, il faudrait savoir ce qu’il cache, ce bonnet d’hipster hystérique qui a pris au mot le blog mode d’un américain gay qui fait pouffer tout Brooklyn… Des cheveux sales et gras ? Une envie folle de se la jouer rebelle ? Une coupe hipster-hitler indésirable à cacher lors d'une fête chez les Cohen ? Des cheveux hirsutes qui poussent ? Voilà que pour ne pas se sentir original avec trois boucles en duel sur un front, Celui qui porte un bonnet choisit le ridicule tue-l’amour d’avoir la tête en forme de bite, capotée pour la mode, vissé là pour désespérer l'ensemble de la gente féminine, ou presque. A croire qu’au lieu de réfléchir, le mec qui a un bonnet préfère se faire chauffer les neurones à la main.

Alors, il s’enlève quand, le bonnet ? C’est l’un des problèmes fondamentaux de cette pratique de rustre qui consiste à ne plus démarquer l’intérieur de l’extérieur, la neige de la cendre d’un clope... Pour baiser, il s’enlève, le bonnet ?

La plupart du temps, dans le meilleur des cas. Et c’est là l’affront ultime : comme les plus ardentes extrémistes religieuses, il faut au moins être ultra intime pour prétendre voir les cheveux de Celui qui porte un bonnet. Ce qui reviendrait donc à dire que ce foutu bonnet de hispter qui décrédibilise un génie et le transforme en petit con, c’est la burka du branchouille. Avec la chemise à carreaux. Et la montre Casio. Et pour voir au travers, faut tout donner : c’est bien connu, pas de bras, pas de chocolat, là c’est pas de pieu, pas de cheveux.


Ou plutôt le contraire…