1.10.2011

L'Expatrié

L'Expatrié n'est pas un homme comme les autres, même s'il en a tout l'air. Être expatrié, même si on l'est de son plein gré, est comparable aux exils des voyous en Nouvelle-Guinée : l'Expatrié fuit toujours quelque chose. Sauf qu'avant de partir, il l'ignore encore, ce n'est qu'une fois sur place, stagnant dans l'exotisme  moite de son nouveau pays, qu'il se rendra enfin compte : plus qu'un exilé, l'Expatrié est un évadé.

Mais que fuit aveuglément l'Expat' ? On ne part pas quelques années au bout du monde pour économiser sur ses courses de taxis. Enfin, pas que. Mais pour les femmes faciles, peut-être. C'est un fait : 99% des loser du coït sur le territoire national s'envoient en l'air au moins une bonne fois par semaine sous les tropiques. Les plus fiers ne paient pas, car les dieux sont avec eux : ils sont Blancs, de quoi faire fondre le cœur sucré d'une Népalaise, d'une Chinoise, ou d'une Sud-Africaine. Surtout si elle est professionnelle. Soyons francs, ça reste bien moins cher qu'en France, une pipe vanillée. Ça, et les chemises de coton aussi.

Il porte donc du sur-mesure et balade ses couilles légères, l'Expatrié, se targuant à qui veut, aux amis en visite par exemple, de connaître aussi bien les clubs les plus fabuleux de la Capitale de l'Asie autant que les meilleurs boui-boui du quartier, sans parler des salons de "massage". Un homme polyvalent, polyamoureux, polytrique.
Si seulement l'Expatrié était aussi à l'aise dans son propre pays ; ah, si seulement on rencontrait des Européennes frivoles en plein Paris sans payer la pinte aux tarifs en vigueur à St.Michel ! si seulement le Baron jugeait à la couleur de peau ! se dit-il aussi. Il ferait mieux le malin dedans, et pas le piteux trop bronzé paumé devant l'infranchissable porte.

C'est là la Chute perpétuelle de l'Expatrié : toujours il revient au même bitume, et toujours le même constat amer le hante : si l'adage se dit "on n'est pas à Hollywood" pour calmer les ardeurs des Parisiens, l'Expatrié finit par comprendre à ses dépends qu'on n'est pas à Shanghai, là. Eh non.
Si l'éternel retour à soi possède donc un goût amer, on ne peut blâmer l'Expatrié d'avoir eu de l'espoir : le V.I.E, ça sent la vie, la vraie, pourtant ce n'est qu'un semblant d'Amériques pour les écoles de commerce... Alors l'Expatrié un jour s'en rend bien trop compte et s'en revient, la queue entre les jambes cette fois, le reflet étoilé des buildings flamboyants de succès voilant désormais ses pupilles tristes. 

Or, qui peut le narguer d'avoir réussi sa vie ?

Que celui qui a une Rolex avant 50 ans lui jette la première pierre... Ou la Rolex.