4.11.2009

Le Radin


On croyait que c'était la Dolce Vita, et l'on zigzaguait entre rive gauche et rive droite, heureux et insouciants. C'était le temps des débuts de l'amour, et l'ambiance était glamour, printemps oblige, petit short et grandes bottes de cuir; ne manquait plus que le trench. Disait-il. Être a.d. c'est tout un poème, une philosophie de vie, une éthique. La panoplie vie-ma-vie: vespa, jeune copine, chemise classe mais froissée, en mode rebelle, et du temps à perdre à se montrer en terrasse, Carreau du Temple, Place Monge, Chez Prune. Classique, décevant. C'est enivrant, la dolce vita; la fille se colle à lui au virage, l'on va vite, ou au contraire, l'on peut prendre le temps. Allons manger chez l'Italien; je connais le meilleur sushiman de Paris; tu n'en reviendras pas, de ce cheese-cake... Eveil des sens, on fait l'amour à l'aube, on se cherche la nuit, dors nue, je viens ce soir.
Qu'est-ce qu'on est libre quand on bosse dans la pub, je pensais. 
Il ne faut pas être stagiaire, cependant, quand on sort avec ce a.d.-là. Le vieux 45 tours de Christophe tournait, et on aurait pu penser que tout roulait, comme dans Tournez-Manège. Je croyais que j'avais rencontré l'amour, hélas, à chaque repas dégusté, à chaque panna cotta partagée, une fois le café enfilé...

On partage?

Le disque s'est rayé. Toujours la même musique. 
The end of la Dolce Vita: j'ai bien dû lui dire que mon porte-feuille ne suivait pas le doux rythme du tourbillon de la vie. Et qu'il était pingre. Il s'est enfui comme un chat, vexé comme un pou: heureusement que tout près était garée sa vespa.